Boycott MonPsy

Bonjour à tous,

Il me semble nécessaire d’écrire un petit laïus sur les raisons pour lesquels je fais partie des milliers de psychologues qui boycottent le dispositif gouvernemental intitulé MonSoutienPsy.

Notre gouvernement vous fait croire que grâce à ce dispositif vous pouvez bénéficier de douze séances gratuites. Mais comme dans tout contrat, il y a des petites lignes et avec MonSoutienPsy, elles sont nombreuses. Laissez-moi vous les expliciter:

  1. Les séances ne sont pas gratuites: vous devez les payer et vous êtes remboursés ensuite. Pour cela, le psychologue n’étant pas reconnu professionnel de santé, il faut procéder en utiliser des feuilles de soin à renvoyer via courrier postal à la CPAM, il y a donc non seulement un délai de remboursement incertain mais également des risques de perte (avérées d’après les critiques émises par ceux qui ont adhéré au dispositif). L’information donnée par le gouvernement est mensongère.
  2. Le psychologue doit procéder, lors de la première séance, à une évaluation de votre état psychologique afin de vérifier si vous rentrez dans les critères d’inclusion (oui, il y a des critères: quoiqu’on vous fasse croire, tout le monde ne peut pas en bénéficier. Nous y reviendrons juste après). Cette séance est à vos frais et ne vous sera remboursée que si vous êtes dans les critères d’inclusion.
    Dans le dispositif, 12 séances prises en charge sont prévues. L’offre est alléchante : 1 séance par mois, sauf que dans la réalité, pour qu’une thérapie soit efficace, nous vous rencontrons deux fois par mois en moyenne. Parfois plus, parfois moins.
  3. Le gouvernement nous demande de faire de la « thérapie de soutien », les psychologues ne savons pas de quoi il s’agit. Lors d’un éventuelle renouvellement, le gouvernement nous demande de réaliser des « thérapies structurées ». Là encore, nous ne savons pas ce que c’est. Personnellement, je travaille avec vous dès la première minute de la prise de rendez-vous, il n’y a pas de différence entre une première et une douzième séance ! Nous refusons cette considération de la santé mentale à deux vitesses.
  4. Durant l’évaluation et à chaque renouvellement, le psychologue doit notifier la/les raisons pour lesquelles vous le consultez à la CPAM. Le secret saute donc allégrement et sans même vous demander votre consentement. Nous refusons de divulguer les informations vous concernant.
  5. Les critères d’exclusion sont tellement nombreux que peu de personnes peuvent en fait bénéficier de cette prise en charge. Ceux qui sont exclus sont ceux qui présentent des troubles dépressifs ou anxieux sévères, ceux qui prennent un traitement, ceux qui ont déjà attenté à leur jour, ceux qui souffrent d’addiction ou encore de troubles alimentaires, ceux qui sont en arrêt de travail pour la raison qui les amènent à consulter… Bref, vous l’avez compris: seuls ceux qui ne vont pas trop mal pourront être remboursés. Nous refusons cette discrimination.
  6. L’état nous demande de pratiquer des honoraires (sans dépassement autorisé) de 50€. Cela signifie que l’état nous demande de travailler pour 10 à 20% de moins de nos honoraires actuels en fonction des villes d’exercice (les charges n’y sont, en effet, pas les mêmes). Accepteriez-vous que votre employeur vous paie 10 à 20% de moins pour le même travail fourni ? Nous refusons d’être déconsidéré et d’être maltraité.

Ce dispositif n’est qu’une manière de jeter « de la poudre de perlimpimpin » (vous reconnaitrez l’auteur de cette célèbre citation, je suppose). On vous annonce un remboursement total mais en réalité, seul 0,5% des français peuvent en bénéficier. Nous refusons un dispositif construit dans ces conditions arbitraires et sans concertation avec les principaux concernés : les psychologues.

On vous demande à vous de ne pas aller trop mal pour pouvoir en bénéficier. Les autres, dommage pour vous: vous souffrez trop pour être considérés par le gouvernement. Et enfin, on demande aux psychologues de sacrifier leur éthique et leur déontologie pour adhérer à ce dispositif. Il en est hors de question.

Je fais donc le choix de boycotter ce dispositif.

Noëlla Masson.